Société asiatique Cristina SCHERRER-SCHAUB

Communications :

Madame Cristina Scherrer-Schaub, Directeur d’Etudes à l’EPHE,
a présenté les communications suivantes lors des séances du vendredi :

Séance du 18 novembre 2011

« De Lhasa à Rome : l’entrée de la vacuité dans le monde moderne. Les écrits tibétains d’Ippolito Desideri »

Le 26 juin 1715, Ippolito Desideri accompagné de son aîné le Père Manoel Freyre arrive à Leh, capitale du Ladakh en route vers Lhasa, capitale du Tibet. Le voyage durera huit mois. Alors que Freyre, éprouvé par les conditions de vie particulièrement difficiles, rentre immédiatement en Inde, Desideri passera cinq ans à Lhasa. Une rencontre exceptionnelle s’opère alors entre des savants de même taille et des discussions philosophiques se tiennent au monastère de Sera avec, en arrière-plan, les Sommes de deux géants : rJe Tsoṅ kha pa, le scoliaste bouddhiste (1357-1419) et Saint Thomas d’Aquin, le « Doctor Angelicus ». (1224/5-1274). En 1728, Desideri est de retour à Rome : la « vacuité » (Tib. stoṅ pa ñid, Skr. śūnyatā) fait ainsi son entrée triomphale dans le monde moderne, tout comme la recette du thé salé tibétain. Mais au-delà des récits savoureux sur le Pays des neiges et des discussions passionnantes sur la « métempsycose », à savoir le cycle des existences (Tib. srid pa‘i ‘khor, Skr bhava-cakra) ou transmigration (Tib. ’khor ba, Skr. saṃsāra) transparaît un pan de l’histoire intellectuelle des hommes où les problèmes de traduction et d’interprétation, pour ainsi dire, s’universalisent.

Séance du 22 mai 2015

« Si loin de lHasa ! Fragments minuscules d’histoire des monastères du Spiti (Himachal Pradesh, Inde) ».

En 1998, lors d’une mission dans les régions du nord du Pakistan, nous tombâmes sur un fascicule de documents tibétains avec des notes en urdu. Comme le releva par la suite notre enquête, il s’agissait de copies d’actes et épigraphes concernant les monastères du Spiti que Sir John Marshall avait fait transcrire pour le compte de l’Archaeological Survey of India.
Le Spiti (aujourd’hui partie du tehsil de Lahaul-Spiti) prend son nom de la rivière tributaire de la Satlej qui le traverse et fut, aux X-XIIIe siècles, l’un des centres importants du royaume de Puraṅ-Guge. Les superbes monuments qui, tel Tabo, préservent aujourd’hui encore des trésors artistiques, notamment des peintures murales, illustrent le « cosmopolitisme » de ces régions de rencontres et croisements de personnes venus parfois de très loin.
Les régions occidentales du Tibet qui, en dépit de vicissitudes diverses, essentiellement marquées par les enjeux du commerce reliant lHasa au Kāśmīr, maintinrent des liens souples avec les autorités du Tibet central, furent ensuite annexés, au XVIIe s., par le gouvernement du Dalai Lama. Le Spiti, qui en 1846 fut séparé du Ladakh et intégra les territoires du British Rāj, entre alors dans l’oubli des « histoires minuscules ». Pourtant, l’étude des documents mentionnés révèle des faits curieux qui relient ce petit pays aux destins du bouddhisme asiatique.


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