Publications Journal des Savants : Juillet-Décembre 2021

Journal des Savants : Juillet-Décembre 2021
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Présentation

« Le monument funéraire d’un notable narbonnais : la mémoire familiale et une carrière d’exception. À propos d’une inscription de Paguignan (Aigues-Vives, Hérault) », par Michel Christol.

 

Une inscription incomplète (AE, 1951, 62), peu connue et peu utilisée, apporte des renseignements importants sur les débuts du culte d’Auguste divinisé en Narbonnaise. Elle concerne un notable de la colonie de Narbonne, dont la sépulture fut établie sur son domaine, à distance du chef-lieu. L’ensemble de la famille fait l’objet d’une présentation à caractère mémoriel. Le personnage principal a suivi la carrière des honneurs, associant une carrière municipale et une carrière équestre. La curatelle du templum divi Augusti dans la colonie traduit sa réaction à l’annonce de la mort du prince. La carrière se prolonge par de plus hautes fonctions qu’il n’est pas possible de définir précisément. Le rapprochement avec une inscription de Cuers, colonie d’Arles (AE, 1999, 1016), permet d’envisager le rôle qu’aurait par la suite tenu cet important édifice religieux de la capitale provinciale.

 

An incomplete inscription (AE, 1951, 62), little known and little used, provides important information on the beginnings of the cult of Augustus deified in Narbonne. This inscription concerns a notable of the colony of Narbonne, whose burial place was established on his domain, at a distance from the capital. The whole family is the subject of a memorial presentation. The main character followed the course of honors, combining a municipal career and an equestrian career. The guardianship of the templum divi Augusti in the colony reflects his reactions to the news of the prince’s death. The career is extended by higher functions which we are not able to define precisely. The comparison with an inscription of Cuers, colony of Arles (AE, 1999, 1016), allows us to consider the role that this important religious building of the provincial capital would have subsequently played.

 

 

« L’utopie réalisée : Thomas More en Nouvelle-Espagne », par Jean-Robert ARMOGATHE, membre de l’AIBL.

 

Un exemplaire de l’Utopia de Thomas More (Bâle, 1518), conservé dans la Bibliothèque de l’Université d’Austin (Texas), comporte de nombreuses notes marginales. Il a appartenu à Juan de Zumárraga (1468-1548), premier évêque de México, auteur probable de ces notes. Or son proche ami Vasco de Quiroga (1470 ?-1565), auditeur de la Deuxième Audience en Nouvelle-Espagne, puis, en 1538, évêque du nouveau diocèse de Michoacán mentionne Thomas More, « homme illustre et plus qu’humain », dans son Información en derecho sobre algunas provisiones del Real consejo de Indias (1535), et il soutient que le modèle de république proposé par l’humaniste anglais convient parfaitement aux Indiens, chez qui il retrouve les « hommes d’or » des Saturnales de Lucien. Dans les Lois et Ordonnances qu’il établies pour les villages-hôpitaux où il a rassemblé les Indiens, il propose des mesures que l’on peut souvent rapprocher de passages soulignés ou commentés dans l’exemplaire conservé à Austin. Ce projet n’est seulement une tentative unique de réaliser l’utopie morienne : en essayant de reconstituer un âge d’or de l’Église primitive, Vasco de Quiroga témoignait de la tension eschatologique d’un Nouveau monde fort de toutes les promesses.

 

A copy of Thomas More’s Utopia (Basel, 1518), held in the University of Austin Library (Texas), contains numerous marginal notes. It belonged to Juan de Zumárraga (1468-1548), the first bishop of México, who probably wrote the notes. A close friend of him, Vasco de Quiroga (1470 ? -1565), auditor of the Second Audience in New Spain, and, in 1538, bishop of the new diocese of Michoacán, mentions Thomas More, « an illustrious and more than human man », in his Información en derecho sobre algunas provisiones del Real consejo de Indias (1535), and he maintains that the model of republic proposed by the English humanist is perfectly suited to the Indians, in whom he finds the « golden men » of Lucian’s Saturnalia. In the Laws and Ordinances that he drew up for the hospital-villages where he gathered the Indians, he proposed measures that can often be compared to passages underlined or commented on in the copy preserved in Austin. Quiroga’s project is not only a unique attempt to realise the Morian utopia: in trying to reconstitute a golden age of the primitive Church, he bore witness to the eschatological tension of a New World full of promise.

 

 

« Le monastère arménien de Bagnayr (Xe-XIVe s.). Archives de T‘oros T‘oramanean et inscriptions lapidaires », par Ani T. Baladian, Jean-Pierre MAHÉ, membre de l’Académie, avec le concours de Philippe Dangles.

 

En 1903, Toros Toramanian, originaire de Şabin-Karahisar en Anatolie, architecte spécialisé en histoire de l’art, quitte Paris pour Ani, l’ancienne métropole des rois Bagratuni (Xe-XIe s.) et des princes zakarides (XIIe-XIVe s.), fouillée par Nicolas Marr en 1893-1894. À partir de 1904, Toramanian participe à toutes les campagnes archéologiques menées par ce savant. Il étudie aussi les monastères périphériques d’Ani, dont Bagnayr, fondé en 1010 par Smbat Magistros.

 

En 1913, projetant d’écrire un ouvrage historique sur l’architecture arménienne, en collaboration avec Josef Strzygowski (de Vienne), il lui confie ses plans et ses photos. Mais la Guerre mondiale coupe court à leurs échanges. L’ouvrage paraît en 1918 sous le seul nom de Strzygowski. Toramanian, qui a fourni toute l’information de terrain, n’obtient que très difficilement la restitution de ses documents.

 

Aujourd’hui une partie d’entre eux est conservée dans plusieurs archives et musées de la République d’Arménie. Au contraire de la documentation sur Hoṙomos, conservée au complet (Monuments Piot 81), le dossier de Bagnayr souffre de plusieurs pertes. Néanmoins, le complexe architectural peut être reconstitué avec précision, grâce aux plans et notes de Toramanian, complétés par divers recoupements.

 

Sargisean, en 1845, et Basmadjian, en 1903, ont recueilli sur place quelque 70 inscriptions à Bagnayr. Répartis entre deux espaces, le narthex (žamatun) et la salle funéraire (tapanatun), les textes nous livrent des informations précieuses sur les patrons, c’est-à-dire les protecteurs princiers du monastère, sur leur entourage, leurs alliances matrimoniales et leur politique de reconquête, sur les habitants de la métropole d’Ani et des campagnes environnantes, sur l’artisanat, le commerce et les cultes, sur les équipements collectifs, le droit coutumier (dots, successions), sur les conséquences des invasions seldjoukides et mongoles. Nous y percevons aussi l’écho de l’arménien parlé (moyen-arménien) des XIe-XIVe siècles.

 

In 1903, Toros Toramanian, a native of Şabin-Karahisar in Anatolia and an architect specialising in art history, left Paris for Ani, the ancient metropolis of the Bagratuni kings (10th-11th centuries) and the Zakarid princes (12th-14th centuries), which had been excavated by Nicolas Marr in 1893-1894. From 1904 onwards, Toramanian took part in all the archaeological campaigns conducted by this scholar. He also studied the peripheral monasteries of Ani, including Bagnayr, founded in 1010 by Smbat Magistros.

 

In 1913, planning to write a historical work on Armenian architecture, in collaboration with Josef Strzygowski (from Vienna), he entrusted him with his plans and photos. But the World War cut short their exchanges. The book was published in 1918 under Strzygowski’s name alone. Toramanian, who had provided all the field information, had great difficulty in obtaining the return of his documents.

 

Today, some of them are kept in several archives and museums of the Republic of Armenia. In contrast to the documentation on Hoṙomos, which is preserved in full (Monuments Piot 81), the Bagnayr file suffers from several losses. Nevertheless, the architectural complex can be accurately reconstructed, thanks to Toramanian’s plans and notes, supplemented by various cross-checks.

 

Sargisean, in 1845, and Basmadjian, in 1903, collected on site some 70 inscriptions at Bagnayr. Divided between two spaces, the narthex (žamatun) and the burial hall (tapanatun), the texts provide us with valuable information on the patrons, i.e. the princely protectors of the monastery, on their entourage, their matrimonial alliances and their policy of reconquest, on the inhabitants of the metropolis of Ani and the surrounding countryside, on crafts, trade and worship, on community facilities, on customary law (dowries, inheritance), on the consequences of Seljuk and Mongol invasions. We also perceive the echo of the spoken Armenian (Middle Armenian) of the 11th-14th centuries.

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