Membre 2015

Paul BERNARD

Élu membre de l’Académie le 31 janvier 1992, au fauteuil d’André CHASTEL, après avoir été nommé correspondant le 20 novembre 1987, l’orientaliste et helléniste Paul BERNARD nous a quittés le 1er décembre 2015, à Paris, à l’âge de 86 ans. Normalien, agrégé de grammaire, ancien membre de l’École française d’Athènes, ancien pensionnaire de l’Institut français d’Archéologie du Proche-Orient à Beyrouth et docteur ès lettres, Paul BERNARD était directeur d’études émérite à l’École pratique des Hautes Études où il enseigna à partir de 1981. Directeur de 1965 à 1980 de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA), il a conduit de 1965 à 1978 la fouille célèbre d’Aï Khanoum ; au CNRS, il avait été responsable de l’URA « Hellénisme et civilisations orientales » de 1982 à 1993. Tout à la fois archéologue, spécialiste de l’art gréco-oriental, épigraphiste et numismate, Paul BERNARD était le meilleur spécialiste en France des civilisations de l’Orient hellénisé (Asie centrale). Les liens étroits qu’il avait noués au sein de la communauté scientifique internationale, tout particulièrement avec les savants russes, l’ampleur des résultats auxquels avaient abouti ses travaux, lui avaient valu d’être appelé au sein de plusieurs académies et sociétés savantes : l’Académie des Sciences de Russie en premier lieu, le Deutsches archäologisches Institut de Berlin, l’Accademia nazionale dei Lincei et l’Istituto Italiano per il Medio ed Estremo Oriente (Rome). Expert réputé, il dirigea la Revue archéologique de 1985 à 1990. Paul BERNARD nous laisse une œuvre constituée d’une multitude d’articles et de mémoires d’une érudition exceptionnelle, ainsi que plusieurs ouvrages : deux tomes des Fouilles d’Aï Khanoum, l’un portant sur les Campagnes 1965-1968, en 2 vol. (1973, collectif), l’autre sur Les monnaies hors trésors. Questions d’histoire gréco-bactrienne (1985), un volume d’Études de géographie historique sur la plaine d’Aï Khanoum (1978), publié en collaboration avec M. Henri-Paul Francfort, correspondant de l’AIBL, ou bien encore une traduction établie avec plusieurs de ses collègues et pourvue de compléments de l’ouvrage de B. Staviskij, La Bactriane sous les Kushans. Problèmes d’histoire et de culture, parue en 1986.

Sergio Donadoni

Nommé correspondant étranger de l’AIBL, le 21 décembre 1990, l’égyptologue italien Sergio Donadoni est décédé le 31 octobre 2015, à l’âge de 101 ans. Successivement professeur aux Universités de Pise, Milan et Rome « La Sapienza », qui lui conféra l’éméritat, Sergio Donadoni était un archéologue de haute notoriété internationale, ce qui lui valut de participer aux travaux diligentés par l’UNESCO pour le sauvetage des temples d’Abou Simbel dans les années 60. Il dirigea de nombreuses fouilles notamment à Antinoupolis, à El-Asasif (Thèbes Ouest, tombeau de Sheshonq Iᵉʳ) ou dans les Gebel Barkal (Napata) au Soudan. Membre de plusieurs académies à travers le monde (Accademia dei Lincei, Accademia delle Scienze di Torino, della Pontificia Accademia Romana di Archeologia, Institut d’Égypte) et du Deutsches Archaölogisches Institut, lauréat en 1975 du Prix Feltrinelli pour l’archéologie, il était Grand-Croix de l’Ordre du Mérite de la République italienne. Parmi ses publications marquantes, l’on citera : La civiltà egiziana (1940), Arte egizia (1955), La religione dell’Egitto antico (1955), Storia della letteratura egiziana antica (1957), Appunti di grammatica egiziana (1963), Testi religiosi egizi (1970) et Tebe (1999).

Silvio CURTO

Élu associé étranger de l’Académie le 5 juin 1998, après avoir été nommé correspondant étranger de la Compagnie le 23 octobre 1992, l’orientaliste Silvio CURTO est décédé le 24 septembre 2015 à Turin à l’âge de 96 ans. Professeur émérite à l’Université de Turin, directeur vingt-cinq ans durant du fameux Musée égyptien de la capitale piémontaise, Silvio CURTO était un égyptologue complet, tout à la fois archéologue et muséographe. Il avait dirigé de 1960 à 1970 les fouilles italiennes conduites dans le cadre de la campagne internationale pour l’étude des monuments de la Nubie, avant leur submersion sous les eaux du lac Nasser. On rappellera qu’en reconnaissance de cette action d’envergure, le gouvernement égyptien octroya alors à l’Italie le petit temple d’Ellesiya, qui vint enrichir la collection constituée à Turin, au demeurant si savamment réorganisée par Silvio CURTO. Membre de l’Institut d’Égypte et du Deutsches Archäologisches Institut, Silvio CURTO jouissait d’un grand renom international. Il laisse une œuvre comportant nombre de publications, notamment Il tempio di Ellesija (1970) et une synthèse sur L’antico Egitto (1981), sans compter de précieux travaux sur les collections du musée qu’il dirigea avec tant de ferveur ainsi que sur l’histoire de l’égyptologie.

David Trotter

Nommé correspondant étranger de l’AIBL, le 23 mai 2014, au fauteuil de M. Neil Stratford, David Trotter, spécialiste éminent de linguistique et philologie médiévales, est décédé le 24 août 2015, à Aberystwyth (Pays de Galles), à l’âge de 58 ans. Professeur et directeur du département des langues européennes à l’Université d’Aberystwyth, David Trotter s’était fait connaître par un ouvrage sur la littérature française médiévale et les croisades paru en 1998 (Medieval French Literature and the Crusades, 1100-1300). On lui doit également des éditions remarquables comme celle des Merveilles de la Terre d’Outre-mer (1990), de Jean de Vignay, ou du Traitier de Cyrurgie d’Albucasis (2005), une des sources les plus riches et les plus importantes du vocabulaire médical de l’ancien français. Responsable de la nouvelle édition entièrement revue et notablement augmentée de l’Anglo-Norman Dictionary, M. David Trotter était également un lexicographe de tout premier rang.

Duncan Fishwick

Nommé correspondant étranger de l’AIBL le 5 juillet 1991, l’historien du monde romain Duncan Fishwick est décédé le 6 août 2015, à Edmonton (Alberta, Canada), à l’âge de 86 ansProfesseur émérite à l’Université d’Alberta, dont il fut le président du département des études classiques pendant quelque vingt années, Duncan Fishwick était non seulement un spécialiste éminent de la religion romaine, mais aussi un grand épigraphiste et un numismate de réputation internationale. Son domaine de prédilection était la religion impériale dans l’Occident romain, en particulier dans les Gaules, la Bretagne, l’Afrique du Nord et l’Espagne.

Guennadi Andreïevitch Koshelenko

Nommé correspondant étranger de l’AIBL, le 6 novembre 2009, au fauteuil de M. Oskar von Hinüber, l’archéologue russe Guennadi Andreïevitch Koshelenko est décédé le 5 août 2015, à Moscou, à l’âge de 80 ans. Docteur en sciences historiques, Guennadi Adreïevitch Koshelenko accomplit l’essentiel de sa carrière à l’Institut d’Archéologie de l’Académie des Sciences de Russie et au laboratoire de restauration des Biens culturels. Ses activités de terrain étaient considérables, tant en mer Noire à ses débuts qu’en Asie centrale, où il dirigea plusieurs chantiers sur des sites hellénistiques, parthes et sassanides, en Ouzbékistan et au Turkménistan. C’était un grand historien de la civilisation parthe. Il fut l’un des maîtres d’œuvre de la grande encyclopédie sur l’Archéologie de l’Union soviétique à laquelle il a largement contribué lui-même par ses deux volumes sur Les antiquités de la mer Noire septentrionale (1984) et Les états anciens du Caucase et de l’Asie moyenne (1985).

Gilbert DAGRON

Élu membre de l’Académie le 17 juin 1994, au fauteuil de Charles PELLAT, le byzantiniste Gilbert DAGRON est décédé le 4 août 2015, à Paris, à l’âge de 83 ans. Normalien, agrégé de lettres et docteur ès lettres, Gilbert DAGRON débuta sa carrière au sein du ministère des Affaires étrangères, comme chargé de mission auprès de la Direction générale des Affaires culturelles et techniques, puis comme attaché et conseiller culturel auprès de l’Ambassade de France à Moscou, de 1962 à 1964. Chargé de recherches au CNRS à son retour en France, il accomplit un très brillant cursus universitaire à la Sorbonne et à l’Université de Lyon II, avant d’être élu, dès l’âge de 43 ans, professeur d’histoire et civilisation du monde byzantin au Collège de France – dont il sera, de 1997 à 2000, l’administrateur. Ancien président du Comité international des Études byzantines et de l’Association des Études grecques, il dirigea le Centre d’Histoire et Civilisation de Byzance du Collège de France de 1975 à 1997. Spécialiste non seulement de l’histoire urbaine et politique de Constantinople mais aussi de l’idéologie impériale à Byzance ainsi que du christianisme byzantin, et notamment de l’iconologie religieuse, Gilbert DAGRON était un historien mondialement reconnu, un grand épigraphiste et un savant philologue. Il nous laisse une œuvre considérable dont on se bornera à mentionner quelques-uns des livres qui la composent, tous devenus rapidement des classiques : sa thèse de doctorat sur la Naissance d’une capitale, Constantinople et ses institutions de 330 à 451 (1974, 19842), La romanité chrétienne en Orient : héritages et mutations (1984), Empereur et prêtre. Étude sur le « césaropapisme » byzantin (1996), ou bien, plus près de nous, L’hippodrome de Constantinople. Jeux, peuple et politique (2011) et ses deux épais recueils d’articles parus en 2012 sous le titre d’Idées byzantines. De l’ampleur du rayonnement de ses travaux témoigne le nombre des académies prestigieuses qui l’accueillirent en leur sein : l’Académie d’Athènes, l’Accademia nazionale dei Lincei à Rome, la Medieval Academy of America (Cambridge, Massachusetts) ou bien encore l’American Academy of Arts and Sciences (Cambridge, Massachusetts). Président de l’Institut de France en 2003, Gilbert DAGRON était président d’honneur de la fondation Hugot du Collège de France et docteur honoris causa de l’Université d’Athènes.

Jacques FONTAINE

Élu membre de l’AIBL, le 27 mai 1983, au fauteuil de Jean FILLIOZAT, le latiniste Jacques FONTAINE est décédé le 31 mai 2015, à Châtenay-Malabry, à l’âge de 93 ans. Ancien élève de l’ENS de la rue d’Ulm (promotion 1940), agrégé de lettres (1943), membre de la Casa de Velázquez de 1943 à 1946 et docteur ès-lettres (1957), Jacques FONTAINE professa le latin à l’Université de Caen, puis à la Sorbonne jusqu’à son éméritat en 1988. Il y dirigea de 1970 à 1988 l’équipe latine du Centre de Recherches Lenain de Tillemont. Il avait présidé l’Académie et en même temps l’Institut de France en 1993. Spécialiste de l’Antiquité tardive et chrétienne, et en particulier du Haut Moyen Âge wisigothique, à la fois philologue, archéologue et historien de l’art et de la culture, Jacques FONTAINE laisse une œuvre impressionnante, dont l’ampleur et le caractère pionnier lui valurent de très nombreuses marques de reconnaissance dans le monde. Membre de la Real Academia de la Historia de Madrid, de la Real Academia de Bellas Artes y Ciencias Históricas de Tolède, de l’Académie royale de Belgique, de la British Academy, de la Royal Irish Academy et de la Mediaeval Academy of America, il était docteur honoris causa de l’Université pontificale de Salamanque, de l’Université catholique de Lublin et de l’Università cattolica del Sacro Cuore de Milan. Parmi ses travaux majeurs, l’on citera, pêle-mêle, sa thèse consacrée à Isidore de Séville (1959, 19832), dans laquelle il dressait, le premier, l’inventaire de tout ce qui subsistait de la culture classique dans l’Espagne wisigothique, une somme d’esthétique consacrée aux Aspects et problèmes de la prose d’art latine au IIIe siècle, la genèse des styles latins chrétiens (1968), un monumental ouvrage sur L’art préroman hispanique (2 t., 1973-1977), une vaste synthèse sur Isidore de Séville : genèse et originalité de la culture hispanique au temps des Wisigoths (2001), enfin ses éditions impeccables de tant d’auteurs latins, d’Isidore de Séville bien sûr, mais aussi de Tertullien, d’Ammien Marcellin, de Sulpice Sévère et d’Ambroise de Milan.

John BALDWIN

Élu membre de l’AIBL le 14 février 2003, après avoir été nommé correspondant le 23 juin 2000, le médiéviste John BALDWIN est décédé le 8 février 2015, à Baltimore, à l’âge de 85 ans. Docteur en histoire médiévale, John BALDWIN avait accompli l’essentiel de sa carrière à la Johns Hopkins University de Baltimore, où il professa de 1961 à 2001, année de son accession à l’éméritat. Spécialiste du règne de Philippe Auguste et plus largement du gouvernement royal, de la culture scolastique et de la vie aristocratique, il laisse une œuvre fondamentale qui a contribué à mieux faire connaître l’histoire de la France médiévale. Parmi ses ouvrages les plus marquants, l’on citera sa thèse, éditée en 1970, au cœur de laquelle il avait placé la figure de Pierre le Chantre (Masters, Princes and Merchants. The Social Views of Peter the Chanter and his Circle), son maître livre sur The Government of Philip Augustus : Foundations of French Roval Power in the Middle Ages (1986, trad. fr.1991) ou bien encore, plus près de nous, Les langages de l’amour : la sexualité dans la France du Nord au temps de Philippe Auguste (1997) et son magistral portrait de Paris, 1200 (2000). Éditeur des Registres de Philippe Auguste publiés en 1992 par l’AIBL dans sa collection du Recueil des Historiens de la France, John BALDWIN était membre de la Medieval Academy of America, de l’Académie royale des Sciences et des Lettres du Danemark et correspondant de la British Academy.