Séances Séance du 16 novembre 2018

Le programme de la séance placée dans le cadre du colloque « Temporalités rituelles en Mésoamérique. Approches interdisciplinaires » est le suivant :– Communication de Mme Valentina Vapnarsky, sous le patronage de M. Jean-Noël ROBERT : « La composition des temporalités au sein des discours rituels : voix mayas de l’émergence du temps ».

Résumé : Cette communication s’attache à expliciter différents registres temporels et modes de temporalisation constitutifs de rituels mayas contemporains, envisagés à partir des discours rituels qui les composent. On part de l’hypothèse que les rituels agissent temporellement sur deux plans majeurs, celui de la mise en relation de cadres temporels distincts et celui de l’expérience subjective de la temporalité. Souvent, ces plans ne sont ni accessibles — en termes épistémiques — ni vécus — en termes sensoriels — de la même façon par les différents acteurs du rituel, qu’il s’agisse des spécialistes-orants, des autres participants humains ou des divinités et entités spirituelles invoquées. Il s’agira d’élucider l’agencement de cette pluralité d’inscriptions temporelles à partir d’une analyse discursive et pragmatique de rituels pratiqués de nos jours par les Mayas yucatèques. On montrera comment les trois dimensions principales de la temporalité linguistique — ancrage indexical, aspectualité, rythmicité — et les outils spécifiques du maya servant à les exprimer — grammaire, prosodie, rhétorique, poétique — sont mobilisés pour créer une dynamique temporelle propre à l’accomplissement du rituel.

Abstract :This presentation seeks to explain different temporal registers and modes of temporalization constituting contemporary Maya rituals, considered from perspective of the ritual discourses that compose them. We assume that rituals act temporally on two major planes, that of the linking of distinct temporal frames and that of the subjective experience of temporality. Often, these planes are neither accessible (in epistemic terms) nor experienced (in sensorial terms) in the same manner by the different actors of the ritual, be they specialists-orators, other human participants, or invoked deities and spiritual entities. The ordering of the plurality of temporal inscriptions will be elucidated on the basis of a discursive and pragmatic analysis of rituals practiced by contemporary Yucatec Maya. In particular, I will show how the three main dimensions of linguistic temporality —indexical anchoring, aspectuality, rhythmicity— and the specific tools of Maya that serve to express them —grammar, prosody, rhetoric, poetics— are mobilized to create a temporal dynamic specific to the completion of the ritual.

– Communication de M. Leonardo López Luján, sous le patronage de M. Henri-Paul FRANCFORT : « Nuit et jour au Templo Mayor de Tenochtitlan : formes d’évocation du mythe de naissance de Huitzilopochtli ».

Résumé : A partir d’un riche ensemble de données, depuis les pictographies indigènes jusqu’aux contextes archéologiques fouillés par l’auteur dans l’ancienne Tenochtitlan, en passant par des documents historiques coloniaux, cette communication explorera un cas paradigmatique de la tradition religieuse mésoaméricaine, où se trouvent étroitement imbriqués un mythe, une scène architecturale et un rite pour expliquer ensemble la succession temporelle nuit-jour. Le sens nodal du mythe analysé est centré sur l’existence primordiale d’un domaine nocturne, le développement postérieur graduel d’une force diurne et la victoire finale sur la nuit produite par le dynamisme permanent du cycle quotidien lumière/obscurité sous la forme d’un combat des dieux. Cette narration se réfère concrètement à la naissance quotidienne du Soleil. Elle permet de comprendre comment l’architecture, la peinture murale, les sculptures polychromées aussi bien que les offrandes enfouies ont conféré au tout premier édifice religieux de l’empire mexica les qualités d’un véritable théâtre de réitération mémorielle rituelle.

Abstract : Based on a rich array of evidence, including native pictography, colonial historical documents, and various archaeological contexts excavated by the author in the ancient city of Tenochtitlan, this paper explores a paradigmatic case in Mesoamerican religion in which myth, ritual, and architectural setting are inextricably intertwined to explain the temporal passage from night to day. The nodal sense of the analysed myth focuses on the primordial existence of a nocturnal domain, the successive gradual development of a diurnal force, and the ultimate overcoming of the night by an impulse that produces the permanent dynamism of the daily darkness/light cycle in the form of a divine contest. This narrative, which refers to the daily rising of the sun out of darkness, allows us to understand how, in the Great Temple, architecture, mural painting, polychrome sculpture, and buried offerings came together to confer the perfect qualities for the Mexica empire’s preeminent religious edifice to serve as an extraordinary theatre of ritual remembrance.