Fouilles archéologiques Mission française de coopération archéologique au Bangladesh

Les recherches archéologiques françaises à Mahasthan, menées conjointement avec nos collègues bangladais, sont nées d’un accord de coopération culturelle entre la France et le Bangladesh signé en 1992.

Le site de Mahasthan se trouve à une douzaine de kilomètres au nord de la ville de Bogra, au Nord-Ouest du Bangladesh actuel. Cette région sise entre le bras principal du Gange au sud et le Brahmapoutre à l’est correspond à la province (bhukti) ancienne de Puṇḍravardhana. Si ce territoire était bien distinct des autres régions historiques du Bengale, il convient de souligner que l’environnement a beaucoup évolué au fil des siècles, dans la mesure où les innombrables cours d’eau qui constituent aujourd’hui le plus grand delta du monde ne cessent de bouger. Ainsi, la Karatoyā, ce petit filet d’eau qui borde le flanc est de l’acropole de Mahasthan, constituait, à époque ancienne, un vaste système fluvial s’écoulant, depuis l’Himalaya, jusqu’à la baie du Bengale selon un axe nord-sud plus ou moins parallèle aux cours finaux anciens du Gange et du Brahmapoutre. Dans le même temps, la côte maritime devait se trouver sensiblement plus au nord qu’elle ne l’est aujourd’hui. Par conséquent, on peut postuler que, du temps de sa splendeur, Mahasthan était situé sur un grand axe fluvio-martitime qui donnait facilement accès à la mer, ce qui expliquerait certainement son importance stratégique.

 

Le site proprement dit est une ville-citadelle bâtie au sommet d’un coteau qui surplombe un méandre de la Karatoyā. La citadelle est délimitée par un rempart s’étendant en longueur sur 1,5 km et en largeur sur 1 km selon un tracé rectiligne irrégulier. Commencée au XIXe siècle, l’exploration archéologique de Mahasthan se justifie pour de nombreuses raisons :

  • C’est un rare exemple de site archéologique urbain dans le monde indien ;
  • Probablement fondée au IVe siècle av. J.-C., la ville a été très active jusqu’au XIIIe siècle et recèle également des vestiges plus tardifs. Sa séquence d’occupation est donc particulièrement longue ;
  • Contrairement aux anciennes villes du monde indien, telles Mathura ou Patna, aujourd’hui recouvertes par les villes modernes, les possibilités de fouilles et de prospections sont importantes à Mahasthan ;
  • Les vestiges mis au jour dans la citadelle et alentour sont de natures très variées : monuments religieux (temples hindous, monastères bouddhiques, mosquées), architecture militaire (le rempart et ses fortifications), architecture civile (vestiges d’une ancienne demeure palatiale, quartiers d’habitations plus populaires), etc.
  • L’exploration archéologique du site et de ses environs va de pair avec des études environnementales, qu’il s’agisse des variations de la rivière Karatoyā ou des traces d’activité sismique ;
  • Enfin, il est possible de rapprocher les vestiges archéologiques de sources écrites, ce qui permet de revoir l’histoire ancienne du Bengale sous un nouveau jour. C’est ainsi qu’il a pu être proposé récemment que Mahasthan soit le site de la « nouvelle » capitale fondée par le roi Rāmapāla sous le nom de Rāmāvatī dans la seconde moitié du XIe siècle.

Après trois grandes campagnes de fouilles (secteur du Rempart Est de 1993 à 1999, secteur de Mazar de 2001 à 2011 et secteur Sud-est de Bairagir Bhita de 2014 à 2019) principalement consacrées au phasage chronologique du site, la mission s’attache aujourd’hui davantage à comprendre l’organisation urbaine du site, notamment en explorant le « vide archéologique » de la partie occidentale de la citadelle et en actualisant la carte archéologique de la ville et de sens environs.

 

Vincent Lefevre

Conservateur général du patrimoine Sous-directeur des collections, Direction générale des patrimoines, Service des musées de France. vincent.lefevre@culture.gouv.fr

 


Illustrations

  • Fig. 1 : vue aérienne du site de Mahasthan (© GoogleEarth).
  • Fig. 2 : Mahasthan, le rempart et les vestiges de la porte nord-est (© Mission française de coopération archéologique au Bangladesh).
  • Fig. 3 : Fouilles franco-bangladaises du secteur « Sud-est de Bairagir Bhita », 2018 (© Mission française de coopération archéologique au Bangladesh).